Historique des positions prises et de l’évolution observée
Ayant statutairement à défendre les intérêts des inventeurs, la FNAFI a pris très tôt des contacts avec l’INPI notamment et a obtenu un siège en 1975 au Conseil Supérieur de la Propriété industrielle (CSPI) où elle a suivi la mise en place du Brevet Européen.
En 1986, Philippe BERNA, Conseiller du Président pour la PI, avait avec vigueur proposé d’adopter en France le principe du « Premier Inventeur » comme aux USA et pour cela obtenu le soutien de plusieurs députés qui avaient même proposé un amendement dans ce but. Cela n’a pas abouti, ce principe étant connu pour amener une grande insécurité juridique ; d’ailleurs, les USA qui étaient les seuls au monde à l’appliquer viennent d’y renoncer et ont adopté comme tous les autres Etats le principe du « premier déposant », ce qui enfin ouvre la porte à une harmonisation mondiale des lois sur les brevets.
P. BERNA proposait aussi d’imposer aux entreprises une rémunération supplémentaire motivante à leurs inventeurs salariés, comme en Allemagne et au Japon qui avaient déjà à cette époque des records en nombre de brevets demandés. Cette proposition, également soutenue par plusieurs députés, a partiellement abouti en rendant légalement obligatoire une rémunération, mais sans préciser le mode de calcul, ce qui en fait la rendait inopérante. De son coté, le patronat y était peu favorable, craignant des contraintes supplémentaires et préférant garder aux entreprises leur autonomie en cette matière. La FNAFI n’a pas par la suite continué à se battre sur ce sujet, source de conflits internes car ayant très peu d’adhérents inventeurs salariés et par contre, environ un tiers de PME et tenant aussi à établir de bon rapports avec la CGPME et le MEDEF.
A mon avis, il vaut mieux sur ce sujet ne pas contraindre, mais plutôt inciter fiscalement et convaincre les chefs d’entreprise que c’est leur intérêt d’encourager leurs salariés à inventer puis déclarer leurs inventions.
J’ai eu ensuite l’honneur de représenter les inventeurs au CSPI à partir de 1990 et après consultation des Associations et du Bureau, établi en 1993 le document ci-joint « Principale propositions d’ordre législatif pour relancer l’invention en France ». Il a servi de trame à nos actions et notamment à une réponse très structurée, sous forme de fiches, lors de l’enquête de Didier LOMBARD en 1997. Tout bien sûr n’a pas été obtenu, mais il y eu des progrès notables auquel parfois la FNAFI a fortement contribué :
– Mieux combattre la contrefaçon :
Beaucoup de doléances arrivaient aux Associations pour des contrefaçons de brevet non réprimées et nous avons obtenu quelques modestes progrès (loi R. FAUROUX de 1988) en écrivant au Gouvernement et en rencontrant des parlementaires. Mais comme des réformes importantes étaient aussi demandées par d’autres entités (Union des Fabricants UNIFAB, MEDEF notamment) il a été créé en 1995 le Comité national de lutte anti contrefaçon(CNAC). J’y ai représenté la FNAFI avec deux de nos conseillers en PI – Me Colette de MARGUERYE, Avocat à la cour et Jean-Paul MARTIN, Conseil en PI maintenant retraité, puis très récemment Jean-Marc DUBRUNFAUT. Nous y sommes membres de deux Groupes de travail : « Aspects juridiques et normatifs » et « Coopération internationale » qui tiennent 2 à 3 réunions par an. Des progrès importants ont été obtenus, à partir des propositions faites, mais aussi en raison de la Directive européenne 2008/44 mise tardivement en application (loi de transposition du 29/10/2007) :
– Forte spécialisation des tribunaux surtout pour les brevets (un seul à Paris au lieu de 10 autrefois) avec une certaine spécialisation des magistrats. Mais il reste encore à obtenir :
– une durée longue de cette spécialisation, avec un plan de carrière intéressant ;
– la présence de juges techniciens versés dans le domaine de l’affaire en cause A noter que la Chancellerie, toujours réticente à cette présence de juges techniciens qui est pourtant la règle dans la plupart des grands pays industriels, sera bien obligée d’y venir pour constituer la Cour centrale du Brevet unitaire européen à Paris ;
– enfin une spécialisation semblable au pénal, le plus simple étant de donner aussi une compétence répressive aux instances civiles.
– Renforcement des sanctions et augmentation des dommages-intérêts (DI) attribués à la victime en « tenant compte » (si le juge veut bien…) des bénéfices faits indûment par le contrefacteur. Mais la loi française reste encore très imprécise quant aux DI qui sont donc peu prévisibles et doit donc être améliorée. Certains magistrats restent attachés au principe de réparation (tout le préjudice mais rien que le préjudice…) qui permet de laisser parfois au contrefacteur la majeure partie de ses bénéfices.
– Il reste aussi à mettre en place en France un système d’assurance litige comme il en existe déjà chez nos voisins (UK, DE) et aux USA, ou à défaut, un système de capital-risque litige couvrant les frais de procédure moyennant une part des DI obtenus et qui ne pourrait être contracté que pour des bonnes causes bien entendu. Il faut espérer que la mise en place du brevet européen à effet unitaire(BUE) et la constitution en résultant d’un vaste marché d’assurés potentiels amènera les assureurs à s’y intéresser.
– Faciliter l’obtention du brevet français
La FNAFI a contribué à obtenir de l’INPI une réduction de 50% des couts d’obtention puis d’entretien pour les petites entités (entreprises indépendante d’effectif inférieur à 1.000 ; personnes physiques) à l’instar des USA. Une demande semblable est faite par AEI au niveau européen et par IFIA au niveau mondial, pour l’instant sans résultats.
En ce qui concerne les délais, les progrès restent minces : actuellement 8 à 10 mois pour le rapport de recherche, puis 2,4 à 3 ans pour la délivrance du brevet français ; une amélioration très souhaitable dépend de l’INPI mais surtout de l’OEB qui effectue la recherche.
Par ailleurs, la FNAFI a demandé dès 1997, à l’occasion de l’enquête Lombard, l’institution en France d’un modèle d’utilité attractif, semblable au Gebrauchmuster allemand qui connait un grand succès avec les caractéristiques suivantes : coût réduit, obtention rapide, durée 10ans, délai de grâce 6 mois, cumul possible avec un brevet demandé ensuite. Une extension européenne (modèle d’utilité communautaire) demandée également devrait suivre.
– Critères de brevetabilité
Le « délai de grâce » qui permet à l’inventeur de divulguer pendant 6mois ou un an avant la demande de brevet va peut-être enfin être institué à un niveau mondial, depuis que les USA ont adopté aussi le principe du « premier déposant » à la place du « premier inventeur », mais en gardant justement un délai de grâce adapté. Une harmonisation mondiale des lois nationales sur les brevets avec un délai de grâce généralisé devient en effet envisageable et des négociations sont en cours sous l’égide de l’OMPI pour y aboutir . Peut-être verra-t-on un jour un brevet mondial ; en attendant, nous devons continuer à faire nos investigations, essais et mises au point d’invention dans une quasi clandestinité, faute d’un assouplissement de l’exigence de « nouveauté absolue » qui pénalise lourdement les inventeurs européens.
– Coût, délai et qualité du brevet européen
– Coût : les taxes du l’OEB restent malheureusement encore très élevées, bien au dessus de celles demandées aux USA ou au Japon et aucune réduction n’est pour l’instant accordées aux petites entités.
Par contre, une forte réduction des coûts de traduction a été obtenue à partir de 2007, grâce à la ratification par la France de l’Accord de Londres. La FNAFI a beaucoup contribué, aux cotés de la CGPME et du MEDEF et contre les organisations professionnelles (traducteurs, CNCPI) à faire voter cet accord qui limite considérablement les traductions requises par chaque Etat signataire. Le plus souvent, une traduction complète en anglais suffit.
– Délais : ils ont heureusement diminués mais restent encore trop longs (environ 3ans quand tout va bien) et peuvent en plus être prolongés par une opposition formulable jusqu’à 9 mois après la délivrance !
– Qualité : elle peut et doit être améliorée. Si l’examen de nouveauté est reconnu le meilleur du monde, il en est pas de même pour l’exigence d’inventivité qui est encore insuffisante. L’OEB délivre trop de brevets ; il y a une véritable inflation due notamment à la Chine qui émet un nombre croissant de demandes dont la majorité est à rejeter. Mais cette situation n’est pas mauvaise pour l’OEB qui vit des taxes…
– Brevet unitaire européen (BUE)
Ratifié en 2013, après 40 ans de discussions et tentatives avortées, le BUE est vraiment bien long à se mettre en place ; on parle de fin 2015 au plus tôt. Il faut suivre cette procédure et voir si les objectifs initiaux sont réellement atteints :
– Coût réduit (celui de 3 brevets nationaux au maximum) ;
Attaque contre une contrefaçon efficace et abordable. On peut être inquiet : les États signataires ont renoncé à cofinancer le coût de fonctionnement des tribunaux à créer qui sera donc supporté par les parties seulement.
Georges de MONESTROL, Président d’honneur de la FNAFI
[…] Georges a par ailleurs inlassablement appelé à une mise en place au plus tôt du brevet communautaire, là encore pour des raisons de coûts déterminantes pour les inventeurs indépendants. La place manque pour inventorier les causes qu’il a défendues mais elles peuvent être consultées sur cet article qu’il avait rédigé pour le site de la FNAFI : https://fnafi.wordpress.com/fnafi/la-fnafi-et-la-propriete-industrielle-pi/ […]
[…] Georges a par ailleurs inlassablement appelé à une mise en place au plus tôt du brevet communautaire, là encore pour des raisons de coûts déterminantes pour les inventeurs indépendants. La place manque pour inventorier les causes qu’il a défendues mais elles peuvent être consultées sur cet article qu’il avait rédigé pour le site de la FNAFI : https://fnafi.wordpress.com/fnafi/la-fnafi-et-la-propriete-industrielle-pi/ […]